Objectifs régionaux de dépenses d’assurance maladie : mon projet de loi organique

Publié le 20 Février 2014

Suite de l'avancement de mon projet de loi organique qui concerne les objectifs régionaux de dépenses d'assurance maladie : j'ai présenté ce matin dans l'Hémicycle ce projet en ces termes (la vidéo est visible plus bas):

" Dans le cadre de cette nouvelle enveloppe régionale, le Parlement serait également amené à déterminer le montant des vingt-six ORDAM, construits sur le modèle de l’ONDAM. En outre, le montant de chaque sous-objectif de l’ONDAM et des ORDAM ne serait plus fixé qu’à titre indicatif, afin de favoriser la fongibilité des crédits entre les sous-enveloppes. En conséquence, le contenu du rapport annexé au projet de loi de financement de la Sécurité sociale de l’année devrait être modifié, afin que celui-ci décrive notamment la part de l’ONDAM consacrée aux ORDAM pour les quatre années à venir. De la même manière, l’annexe spécifique du PLFSS consacrée à l’ONDAM devrait présenter l’évolution, au regard des besoins de santé publique dans chaque région, des soins financés au titre des ORDAM ainsi que les modifications de périmètre éventuelles des ORDAM. Enfin, la présente proposition de loi organique modifierait les conditions de vote de la loi de financement de la Sécurité sociale afin de permettre au Parlement de se prononcer, par un vote distinct de l’ONDAM, sur le montant de la part régionale de l’ONDAM consacrée aux ORDAM, ainsi que sur le montant des vingt-six ORDAM.
Cependant, mes chers collègues, depuis le dépôt de notre proposition de loi organique le 27 juin 2012, il y a plus de dix-huit mois, le législateur n’a cessé de promouvoir la démarche de régionalisation qui la sous-tend. Ainsi, l’article 65 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012 a créé le fonds d’intervention régional, en fusionnant des crédits et des dotations existants au sein de l’ONDAM, afin de donner à nos agences régionales de santé des instruments financiers souples et faciles d’emploi pour les mettre en situation de responsabilité. La création du FIR visait ainsi à promouvoir une plus grande transversalité des moyens de financement des agences, en favorisant en particulier le décloisonnement entre l’offre ambulatoire et hospitalière, l’offre sanitaire et médico-sociale, ainsi qu’entre les soins et la prévention.
D’un montant de 1,5 milliard d’euros en 2012, le FIR est passé à 3,3 milliards d’euros en loi de financement de la Sécurité sociale pour 2013, en raison d’un élargissement de son périmètre initial à certaines missions d’intérêt général ainsi qu’à des enveloppes destinées à améliorer les parcours de soins. Enfin, il y a quelques semaines seulement, l’article 65 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014 a érigé le FIR en nouveau sous-objectif de l’ONDAM.

Le FIR: insuffisant en pratique
Cette démarche doit être aujourd’hui élargie. Le rapport au Parlement du comité d’évaluation de la loi HPST, conduit par M. Jean-Pierre Fourcade et dont j’étais l’un des membres, estimait il y a trois ans que, les ARS devraient bénéficier à court terme d’une importante fongibilité de leurs moyens d’intervention et que, à moyen terme, le financement de la santé devrait évoluer vers la définition d’objectifs régionaux de dépenses de l’assurance maladie.
Ainsi, si les auditions menées ont démontré que la création du FIR répondait parfaitement aux objectifs de transversalité et de mise en responsabilité des agences régionales de santé, en pratique cela s’avère insuffisant.

En effet, le FIR n’est jusqu’à maintenant constitué que d’une compilation de sous-enveloppes de dépenses préexistantes, de sorte que les directeurs des agences régionales de santé ont toujours l’impression que l’essentiel des crédits du FIR sont en réalité fléchés. Selon M. Claude Évin, directeur de l’agence régionale de santé d’Île-de-France, plus de 90 % de l’enveloppe consacrée au FIR en 2013 pour son agence correspondrait ainsi à des dépenses contraintes, si bien que les marges de manœuvre pour financer des projets innovants dans cette région au titre du FIR seraient limitées à 5 ou 10 % des crédits, soit moins de 58 millions d’euros sur une enveloppe d’environ 580 millions d’euros consacrée au FIR.
Pour tirer les conséquences des évolutions législatives antérieures, il serait pertinent de mettre à jour la présente proposition de loi organique en consacrant, sur le plan tant organique que politique, la création du FIR en lieu et place des ORDAM. Je vous proposerai par conséquent, madame la ministre, mes chers collègues, plusieurs amendements visant à adapter le présent texte aux évolutions intervenues depuis 2012. Ceux-ci ont le mérite de confier aux parlementaires que nous sommes le soin de fixer le montant global de la part de l’ONDAM qui revient au FIR avant de déterminer la répartition des dépenses affectées aux autres sous-objectifs de l’ONDAM. Il ne s’agira donc plus de créer vingt-six ORDAM, comme le prévoyait notre texte initial, mais simplement de donner une plus grande latitude d’action aux agences régionales de santé.
Avec cette proposition de loi organique, madame la ministre, nous souhaitons ainsi sanctuariser politiquement et juridiquement le FIR afin qu’il puisse être voté chaque année par le Parlement, puisqu’il est devenu un outil fondamental pour l’action des agences régionales de santé. Ces amendements constituent l’aboutissement de la démarche de déconcentration de la politique de santé publique au niveau régional, sous le contrôle du Parlement, sans toutefois remettre en cause la capacité de l’État à arbitrer la répartition du FIR en fonction des besoins de santé et des spécificités de chaque région.

La responsabilité des parlementaires est fondamentale
Lors des débats en commission, pour expliquer pourquoi la majorité refuserait de débattre la présente proposition de loi organique, notre cher collègue Gérard Bapt nous a annoncé que le Gouvernement serait sur le point de soumettre au Parlement, d’ici à quelques mois, un projet de loi portant à la fois sur l’organisation des soins et la santé publique. Cependant, cela n’est pas un argument suffisant pour écarter l’adoption de la présente proposition d’un revers de la main. De fait, ses dispositions ne pourront pas être reprises dans le cadre d’un projet de loi ordinaire, M. Bapt, car les modalités de présentation des projets de loi de financement de la Sécurité sociale relèvent de la loi organique et non pas de la loi ordinaire
Si la majorité soutient notre démarche, qui me semble avoir convaincu de nombreux députés sur tous les bancs, il convient de lui donner dès à présent une traduction juridique, au moyen d’un texte qui pourra être amélioré au cours de la navette parlementaire. C’est pourquoi, sans esprit partisan, je vous invite à adopter non pas le texte que nous avions déposé il y a presque deux ans, mais celui, adapté et mis à jour, qui résulterait de l’adoption des amendements que je vous présenterai. Ainsi amendée, cette proposition de loi organique permettra de pérenniser et de consacrer une démarche engagée en 2012 par le Parlement – c’est bien cette responsabilité des parlementaires qui est fondamentale – : donner aux agences régionales de santé un réel budget régional de santé, permettant de mener une politique de santé innovante et décloisonnée, sous le contrôle du Parlement. Votre région, madame la ministre, souhaite également en bénéficier, tout comme votre agence régionale de santé.
Il s’agit donc d’une démarche complémentaire, et non pas fongible, dans le cadre de l’examen d’un futur projet de loi de santé publique. Elle met à jour les dispositions organiques grâce auxquelles la régionalisation et le contrôle parlementaire constitueront deux axes d’une politique de santé que tous nous appelons de nos vœux, loin de tout esprit partisan."

Rédigé par Jean-Pierre Door

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Effectivement, la décentralisation ne sera qu'avantageux, quelque soit le projet de loi à mettre en place. Il en est également de même, pour le domaine de la santé public.
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